mardi 16 mars 2010

La stratégie des drones : quand les avions tuent sans pilote

Un drone est un aéronef sans pilote humain à bord. Le nom veut dire "faux bourdon" en anglais mais ils sont plus communément appelé UAV pour Unmanned Aerial Vehicle. Ils emportent une charge utile destinée, le plus souvent, à des missions de type surveillance, renseignement, au profit des forces armées ou régaliennes d'un état (police, douane, etc.). La taille et la masse (de quelques kilogrammes à plusieurs tonnes) sont fonction des capacités opérationnelles recherchées. Le pilotage automatique ou à partir du sol permet d'envisager des vols de très longue durée, plusieurs dizaines d'heures.
Les avantages des drones par rapport à un avion classique sont nombreux, coûts de fabrication moins élevés, ils sont plus simple à mettre en œuvre (la présence d'un pilote étant l'un des éléments les plus dimensionnant pour la conception d'un tel système), ils sont également plus discrets et leur perte n'est pas aussi lourde de conséquences que celle d'un appareil complet et de son pilote.

Le premier rôle des drones (à l’exception de celui de bombe volante dès la Première Guerre Mondiale qui était plutôt les ancêtres des missiles) a été la collecte de renseignement. Dès la guerre de Corée et la guerre du Viêt Nam les Etats-Unis ont mis à profit leur supériorité technologique en automatique et transmission pour développer des moyens de surveillance sans faire courir de risque à des êtres humains. Lors de la guerre du Kippour en 1973, les batteries de missiles Syrienne au Liban au causé de grandes pertes aux chasseurs israélien. Israël fut donc l’un des premiers pays à développer des drones. Ces drones de reconnaissance ont fournis les images qui ont permis de neutraliser les défenses antiaérienne Syrienne dès le début de la guerre du Liban en 1982. Le résultat fut qu’aucun pilote israélien ne fut touché durant ce conflit.
Durant l’intervention de l’OTAN au Kosovo, les drones permettaient d’avoir de longue patrouille dans l’espace aérien Serbe sans épuisé les pilotes. Par la suite les drones ont intégré des systèmes de désignation des cibles comme les illuminateurs laser. Ce qui permettait de marquer une cible à distance qui sera ensuite attaquée par un appareil classique. En Afghanistan dès 2001, les Predator commandés à distance permettaient des attaques de précision sur des cibles non-accessibles aux forces spéciales.

Mais les drones sont devenus des appareils de combat en 2003 lorsque le Pentagone autorisa l’utilisation des Predator, qui jusqu’à présent ne faisait que de la reconnaissance, pour attaquer à l’aide de missiles anti-char Hellfire. Ces missiles permettaient d’attaquer des véhicules légers comme des petits bâtiments. Ce fut l’arme idéale pour des assassinats ciblés. Par la suite les Predator furent remplacés par les Reaper qui furent également déployés en Irak dès 2003.
A l’heure actuelle les Reaper sont commandés depuis des bases sur le territoire américain où des opérateurs pilotent à l’aide des images de caméras et de radars embarqués les drones au Moyen-Orient. La communication se fait par une liaison satellite sécurisée et le délai de propagation est d’environ 1,2 seconde. Le Reaper peut emporter des missiles anti-char Hellfire, mais également des bombes à guidage laser pour attaquer les bunkers et des missiles air-air pour l’autodéfense.
Israël se sert, depuis 2007, de ses drones pour la destruction des sites de lancement des roquettes Katioucha en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

En Afghanistan et au Pakistan, la politique d’utilisation des drones mise en place par George W. Bush et poursuivit et accélérée par Barack Obama est celle des assassinats ciblés commandités par la CIA. Ces attaques visant principalement des responsables d’Al Qaida ou des leaders Talibans auraient fait entre 830 et 1210 morts selon une estimation à partir de sources ouvertes de Peter Bergen et Katherine Tiedemann pour un rapport pour la New America Foundation. Ils estiment également le nombre de morts civils à 32%. Les drones étaient pourtant déployés dans les régions de l’est de l’Afghanistan et du nord ouest du Pakistan pour servir plusieurs buts. Le premier étant de limités les pertes américaines sur le terrain et le deuxième de limités la présence militaire et donc ne pas se montrer comme une force d’occupation et ainsi gagner les esprits et les cœurs. Mais les morts de civils, dommages collatéraux, ont tendance à renverser cette tendance.
Egalement rechercher par les autorités américaines, la peur de la mort silencieuse pouvant survenir n’importe où, n’importe quand. Mais même cet avantage à été perdu lorsqu’en été 2009, une équipe des renseignements américains découvre dans un ordinateur portable appartenant à un insurgé irakien des copies de vidéos provenant de la caméra d’un Predator. A cette occasion, le Pentagone à appris que moyennant l’achat pour 26 dollars d’un logiciel permettant d’intercepter les flux satellites, les insurgés irakiens pouvaient intercepter en temps réel aux images relayés par les satellites des drones vers leur station de pilotage. Ils ne pouvaient pas prendre le contrôle de l’appareil mais avoir accès aux images supprime l’effet de surprise et permet de connaitre la stratégie d’attaque des Américains.

Le futur des drones au point de vue politique est incertain. Il semble que Barack Obama veuillent continuer la guerre par correspondance même si l’indéniable avantage tactique n’est pas un avantage stratégique. L’assassinat plutôt que la capture ne permet pas d’exploiter les renseignements que les leaders ennemis pourraient fournir ce qui nuit à l’effort de guerre tout autant que les victimes civils. La raison fondamentale de cette intensification voulue par Obama est de permettre les activités militaires sur le territoire Pakistanais sans avoir à envoyer des troupes dans un pays officiellement allié. Le problème est que les responsables Talibans s’enfoncent de plus en plus dans le territoire pakistanais pour commander leurs opérations en Afghanistan ce qui pousse les drones toujours plus profondément dans le pays.

D’un point de vue technologique, les drones seront toujours plus indépendants, toujours plus intelligents et remplir toujours plus de missions. Ils seront également plus maniables et plus discrets. Néanmoins, les problèmes qui vont survenir sont bien connus. Avec une complexification des systèmes, les données à transmettre seront toujours plus nombreuses et plus complexes. Le cryptage et le volume de données, la bande passante utilisée seront les éléments bloquant à la prolifération des drones qui est pourtant en cours. La solution est l’automatisation d’un maximum de fonction mais la doctrine militaire américaine pour l’instant veut que se soit un être humain qui est le dernier mot et que seul un être humain puisse appuyer sur la gâchette. Pour cela il faudra toujours plus d’informations ou faire confiance aveuglément à la machine.

Sources :
• SpyworldActu - Examen du rapport d’information sur les drones – SpyworldActu – 2 décembre 2009 - http://www.spyworld-actu.com/spip.php?article12179
• Scott Shane – « Drones de guerre au Pakistan » - Courrier International – 10 décembre 2009 - http://www.courrierinternational.com/article/2009/12/10/drones-de-guerre-au-pakistan
• Siobhan Gorman, Yochi J Dreazen et August Cole – “Insurgents Hack U.S. Drones” – The Wall Street Journal – 17 février 2009 - http://online.wsj.com/article/SB126102247889095011.html
• Jim Jarrassé - « Les insurgés irakiens piratent les drones américains » – LeFigaro.fr – 17 décembre 2009 - http://www.lefigaro.fr/international/2009/12/17/01003-20091217ARTFIG00675-les-insurges-irakiens-piratent-les-drones-americains-.php
• New America Foundation - http://counterterrorism.newamerica.net/drones
• Peter Bergen et Katherine Tiedemann – “The Year of the Drone” – Counterterrorism Strategy Initiative Policy Paper - New America Foundation – 24 février 2010 - http://counterterrorism.newamerica.net/sites/newamerica.net/files/policydocs/bergentiedemann_0.pdf
• Lemonde.fr avec AFP- « L’utilisation de drones au Pakistan n’a pas d’effet sur la guerre » - LeMonde.fr – 26 février 2010 - http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/02/26/l-utilisation-de-drones-au-pakistan-n-a-pas-d-effet-sur-la-guerre_1311552_3216.html
• Wikipédia, l’encyclopédie libre.

Par AD

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